Nous retrouvons ces jours-ci dans la Bible Youngtimers l’Aston Martin Lagonda, la quatre-portes la plus futuriste d’aspect jamais commercialisée depuis Citroën la DS19. La petite manufacture de Newport Pagnell aurait pu aller plus loin encore avec la Bulldog, une berlinette à V8 central arrière, véritable supercar avant l’heure…
Texte : Laurent Berreterot
Oubliez le cliché de la sportive anglaise surannée ! Double turbo, 600 ch, poignées affleurantes, portes papillon à fermeture électrique, rétrovision vidéo et batterie de phares frontaux escamotables : la Bulldog s’annonce, bien avant la Jaguar XJ220 et la McLaren F1, comme l’engin de route le plus moderne et le plus rapide du monde. Objectif : 320 km/h. Le projet Bulldog débute en 1977, moins d’un an après la présentation du prototype de la Lagonda. A la manœuvre, on retrouve l’ingénieur Michael Loabsy et le styliste William Towns alors adepte de ce style cunéiforme qui saisit violemment le regard. On envisage une production de 25 exemplaires et la Bulldog officiellement révélée en mars 1980 n’est pas une maquette de salon. Il s’agit bel et bien d’un prototype totalement fonctionnel. Les performances s’annoncent exceptionnelles, même si les essais ne permettent pas de dépasser les 307 km/h ! Rappelons qu’à l’époque, la plupart des sujets de Sa Gracieuse Majesté roulent en Ford Cortina, Vauxhall Cavalier, Austin Allegro ou Morris Marina…
Hélas, la situation financière d’Aston Martin ne permet pas d’aller jusqu’au bout de l’aventure. L’unique Bulldog fabriquée est finalement vendue au plus offrant pour 130.000 livres Sterling. Une misère ! Michael Loabsy a entre-temps quitté Aston pour s’en aller concevoir la De Lorean, autre machine insulaire aux ailes papillon que le grand public a pu acheter, elle. Aston Martin ne sortira sa première supervoiture, la V8 Zagato, qu’en 1986. Il ne s’agit que d’une refonte, assez controversée d’ailleurs, de la vieillissante V8 Vantage dont le dessin américanisant, déjà exécuté par William Towns, remonte à 1966. Quant à la Bulldog, elle existe toujours. Elle a été restaurée en 2020-21 par la société britannique Classic Motor Cars. La rétrovision vidéo n’étant sans doute pas homologuée, elle a simplement reçu d’inélégants rétroviseurs en forme de cornets qui cassent quelque peu l’allure monolithique de l’engin.
Retrouvez la Bulldog dans son état originel dans cet extrait de l’émission britannique Wheels. On y rencontre William Towns, talent aussi méconnu que trop vite disparu (il est décédé en 1991). Il nous présente quelques uns de ces dessins, coincés par l’essuie-glace unique de la Bulldog. Entre-autre projets, une refonte de la Jaguar XJS si controversée, projet que Towns va concrétiser en 1989 sous la forme certes très différente de la Railton F29 Fairmont. Un délice ! Et vous aurez reconnu l’indicatif de Thames Television, rendu célèbre en France par Benny Hill…
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