En complément de notre essai de la 200, en ce moment en kiosque dans notre dernier hors-série, nous vous proposons aujourd’hui de comparer ce premier modèle de Venturi au dernier de cette saga française, l’Atlantique 300 Biturbo !
Il a fallu à peine deux ans de développement, entre le salon de Paris de 1984 et celui de 1986, pour que la maquette non fonctionnelle de la Ventury créée par Gérard Godfroy et Claude Poiraud devienne une voiture prête à entrer en production : la Venturi. C’est chose faite au printemps 1987 à l’usine de Cholet (49), les premiers clients prenant livraison de leur voiture en milieu d’année. Si la Venturi reprend quasiment trait pour trait le dessin originel de Godfroy et le même empattement de 2,4 m, elle monte en gamme : habitacle toutes options, finition luxueuse à l’anglaise et surtout, V6 PRV 2,5l turbo à la place du 4-cylindres 2,2l de 505 Turbo à kit PTS équipant le prototype d’essai. Le V6 longitudinal de 200 ch correspond à celui de l’Alpine V6 Turbo mais se trouve monté à l’envers : position centrale postérieure au lieu de porte-à-faux arrière. Pas de places d’appoint pour la Venturi, mais un second coffre derrière le moteur. Elle porte la marque MVS, pour Manufacture de Voitures de Sport, acronyme voulu par Hervé Boulan, son premier PDG, mais que Xavier de la Chapelle finira par abandonner pour le salon de 1990 au profit de Venturi tout court. Le public n’a jamais retenu correctement ces trois lettres !
Contrairement à l’Alpine GTA, la Venturi a bénéficié de la bienveillance de la quasi totalité de la presse automobile française, pas indifférente à la naissance d’une marque de sportives prestigieuses dont notre pays est cruellement orphelin. L’élitiste Automobiles Classiques a fait sa une avec le prototype à moteur 505. Auto Hebdo a même comparé la Venturi à l’iconique Facel II. Seul Chrome et Flammes a trouvé le dessin de Godfoy « trop doux, trop souple et trop classique. » Pour le reste, les plumitifs ne cesseront de louer les qualités d’équilibre du châssis mis au point par Philippe Beloo selon des standards digne de la compétition. Au contraire, ils reprocheront constamment à la Venturi sa commande de boîte et la sonorité peu éclatante du V6 PRV, sans compter les sifflements divers de la waste-gate que j’ai toutefois trouvé moins envahissants qu’on ne l’a écrit, du moins sur la 200…
Précisons que la première MVS Venturi, codée Cup221 par l’usine, a hérité rétrospectivement du nom de Venturi 200 par opposition aux 210 et 260 à catalyseur lancées en 1990. A cette époque, la mode du bio design venue du Japon bat son plein, et la GT biplace française ne paraît plus aussi fluide. Contrairement à son ami Claude Poiraud, Gérard Godfroy n’a jamais été salarié de MVS et Venturi, mais il a dessiné chaque évolution de la voiture : le cabriolet Transcup, les 210/260, la Trophy et la 400 GT, la dernière créée sous la direction de Claude. Par ailleurs, Gérard a dessiné dès 1990 une évolution plus souple d’aspect. En 1994, la reprise de Venturi par Hubert O’Neil après les années de la Chapelle, lui donne l’occasion de concrétiser ses idées. Dès octobre au salon parisien qui se veut Mondial, la nouvelle Atlantique 300 suscite des commentaires aussi élogieux que la Ventury dix ans plus tôt.
Il s’agit grosso modo d’une Venturi à l’empattement agrandi de 10 cm dont on a adouci tous les angles. Godfroy a profité de la suppression des bâtis de portières de Renault Fuego (les glaces avant n’ont plus d’encadrement) pour atténuer l’angle d’attaque du pavillon et assouplir les contours des baies vitrées. Les prises d’air se fondent désormais dans les hanches élargies. La 300 conserve le principe des phares escamotables, mais leur mécanisme est à présent solidaire du capot et non du châssis. Les rétroviseurs de CX série 2, très prisés pour leur beauté et leur facilité de montage par bien les manufactures de sportives semi-artisanales, font toujours partie du voyage. A bord, la planche de bord avec bois et cuir n’a pas évolué à l’exception des compteurs à fond blancs et conserve donc les raideurs des années 1980…
Le V6 3 litres mono-turbo (mais à deux soupapes par cylindre) issu de l’Alpine A610 développe maintenant 281 ch. Malgré des performances exceptionnelles, on lui reproche toujours ses origines (comme s’il s’agissait encore du type Z6V de la R30 TS…) Tout du moins jusqu’à l’arrivée en 1998 du nouveau V6 Peugeot-Renault qui équipe « notre » Atlantique 300, déjà connue des lecteurs de Youngtimers. Vous remarquerez au passage l’enjoliveur de haut moteur des Xantia et autres 406 V6… Faute là-aussi de moyens, Venturi a confié au petit préparateur belge Alvan Motors, également importateur local de l’Atlantique, le montage de deux petits turbo. Non seulement la puissance passe de 194 à 310 ch mais au volant, presque tous les défauts reprochés à la 200 ont disparu. La direction, beaucoup plus ferme, ne donne plus une impression de surassistance et la pédale de frein a gagné en consistance. Surtout, le moteur ne joue plus à la cocotte-minute alors que la sonorité, bien libérée par rapport au peu que laisse entendre une 406 coupé dotée du même bloc, se fait superbement métallique dès 3500 tours/minute. A 4000, les turbos entament leur vigoureusement poussée, certes plus régulière que sur les 260 et 400 GT, mais dans une rage stridente des plus grisantes. A 5000, 6000, on dirait presque un V12 ! Ce qui laisse imaginer les marges d’évolution inexplorées du bloc EL/L ! Sur l’exemplaire essayé, la commande de boîte a en outre subi une nette amélioration de son guidage depuis sa sortie de l’usine de Couëron.
Il est vrai que ces trop tardives biturbos, construites à la main avant la faillite de Venturi début 2000 tiennent un peu du prototype roulant que certains propriétaires ont continué à développer jusqu’à obtenir la meilleure des Venturi. Enfin, pas pour tout le monde ! Julien, l’heureux propriétaire de la 200, considère la 300 comme trop typée Grand Tourisme, comparée aux Venturi de première génération, plus courtes, plus sportives et plus mobiles…
Et vous, laquelle préférez-vous ? Et pourquoi ?
Texte et photos Laurent Berreterot
En kiosque ce mois-ci, retrouvez la MVS Venturi dans notre numéro hors-série “Sportives Mythiques 80s” et la première partie de la biographie de Gérard Godfroy au sommaire de notre n°125.
Retrouvez également notre essai de la Venturi Atlantique 300 Biturbo, dans n°113 :
Article intéressant. Mais dommage que vous ne m’ayez pas contacté pour parler de cette époque . Cela vous aurait évité de parler des « errements des années de La Chapelle » . Propos tout à fait injustifié au regard de tout ce que ces quelques années ont permis d’apporter de positif à cette belle aventure !
Je serai très heureux d’aborder ce sujet avec vous si vous le souhaitez …
Je ne sais pas pourquoi cette marque n’a pas obtenu le succès, quelle que soit la Direction. MM Boulan, De La Chapelle ou O’Neil n’ont pas réussi à vendre des Venturi en nombre suffisant pour assurer la pérennité de la marque. Pourtant, à ce qu’on peut lire, les voitures étaient et restent de bonnes voitures, parfois aussi performantes que des Ferrari.
L’article sur M. Godfroy est très intéressant, faire parler les acteurs de leurs expériences apporte une sincérité et une émotion des instants vécus.
Alors il peut être opportun de renouveler l’expérience avec d’autres personnalité du monde automobile, et pourquoi pas M. De La Chapelle qui a sorti, outre des répliques et voitures à échelle réduite, un monospace équipé d’un V12 Jaguar ou d’un V8 Mercédès (le nom ne me revient pas…), la ligné des Stimula, et a participé à une multitude d’aventures automobile.
le monoplace s’appelait Parcours. la plupart des acheteurs pensaient quasiment tous immédiatement à la revente. sans image, pas de renommée, un moteur pas jugé noble du fait de sa sonorité.