Vous l’avez sans doute appris : Gérard Welter, styliste chez Peugeot pendant près de 50 ans, auteur notamment du dessin de la 205, nous a quitté mercredi. Nous publions ici le témoignage de l’un de nos rédacteurs, Thierry Astier, qui a eu l’occasion de s’entretenir longuement avec lui dans le cadre de ses recherches.
“Le monde de l’automobile est en deuil : Gérard Welter nous a quitté… J’avais apprécié les discussions téléphoniques que j’ai eu la chance d’avoir avec lui, qui m’avaient confirmé l’impression que m’avait inspirée l’intéressante biographie que lui avait consacré Christophe Bonnaud. Celle d’un homme totalement passionné par l’automobile, qu’elle soit de route ou de compétition. Car Gérard Welter a, pendant plus de 30 ans, eu deux vies : celle du patron du style Peugeot le jour, et celle de directeur de sa petite écurie WM (puis WR), véritable David qui aura défié les Goliath du sport-prototype avec une bravoure et une volonté de tous les instants. Il devait être doué d’une énergie peu commune pour être capable de tout mener de front. Mais quand dormait-il ?
Souvenir aussi de sa très grande humilité, qui transparaît très clairement dans le livre : le styliste évoque une sélection des innombrables Peugeot qu’il a supervisé. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la complaisance, ce n’était pas son truc : il ne mâche pas ses mots sur certains modèles, quitte parfois juger trop durement quelques créations qui en valait bien d’autres (notamment la 505, qu’il ne portait pas dans son coeur). On sent aussi poindre ça et là la frustration – bien légitime ! – d’avoir du pendant si longtemps composer avec l’envahissante concurrence de l’italien Pininfarina. Il faut imaginer ce que c’est que de jouer au bras de fer avec un rival connu du grand public pour carrosser les Ferrari : avant même que le match commence, même vos patrons sont déjà “subjugués” par l’image fantasmatique que projette votre concurrent… De fait, s’il laissait poindre les sarcasmes ça et là sur les projets italiens retenus – la 405 notamment…- ou une certaine tiédeur pour des autos plébiscitées comme la 406 Coupé (mauvais joueur ?), il ne boudait pas son plaisir non plus pour évoquer certaines victoires “historiques” de ses stylistes. En particulier la domination écrasante du style Peugeot sur Pininfarina pour la 205, où les Italiens, totalement à côté de la plaque, s’étaient contentés de moderniser mollement une 104 peu sexy et déjà violemment démodée. Si vous ne possédez pas ce livre, je vous invite à vous le procurer, c’est un hommage bien mérité je trouve. Adieu monsieur Welter donc…”
Pour en savoir plus sur Gérard Welter, lire la biographie de Christophe Bonnaud : Welter, Une vie au Design Peugeot, L’épopée des WM et WR au Mans, Editions Roger Régis, 178 pages, 2008.
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